Regard:
Pas de printemps pour miss Perle !
En cette fin d'année scolaire,
je me sens...vidée ! Je vois parfois le moment où je ne voudrais plus me lever, moi qui adore le matin tôt ! Le moment où je cèderais au besoin de coucher ma fatigue par terre, fut-ce au milieu d'un séminaire ! Je joue avec l'envie de ne plus répondre au téléphone, de refuser d'aller plus loin, comme un âne trop chargé qui décide de sécher sur pieds plutôt que faire un pas de plus.
Que se passe-t-il ?
Je constate autour de moi que les gens sont fatigués, déprimés, abattus même. La crise, la politique, la morosité habituelle et... et le temps qu'il fait ! Mais bien sûr ! Si un jour on m'avait dit que je serais à ce point sensible au temps de saison, comme tous ceux qui règlent chaque matin leur humeur sur la météo! Eh bien, oui ! Ce temps mausade est déprimant, et pourquoi? Parce que le ciel ne joue pas le jeu!
Le jeu du printemps,
comme je l'expliquais ici, est celui d'une lente montée de notre désir de chaleur, de soleil, de douceur, notre légitime désir de la plénitude de l'été. Et ce désir, cet espoir de renouveau est habituellement attisé par les allers et retours entre l'hiver et l'été. D'habitude, nous avons un jour de douceur et un jour de vilain temps aigre. Une heure d'été aux terrasses bondées comme des plates-bandes de tournesols, et une heure pour courir sous l'averse qui rebondit sur les tables et dans les tasses de café abandonnées. Quelques semaines de coquetterie météorologiques et le beau temps s'installe !
Pas cette année !
D'ordinaire, chaque jour apporte un peu plus de lumière, un peu moins de pluie, un sourire supplémentaire du soleil, une prime de petite brise douce, un bonus de rayons. Chaque jour nous raconte à nouveau l'histoire éternelle: après la pluie le beau temps, après l'hiver le printemps, après la mort, le renouveau et la vie nouvelle. Et nous avons besoin de cette histoire, elle est dans l'ordre des chose, dans notre programme. Elle nous nourrit, nous berce d'espoir et nous aide à "porter le cycle" naturel, à l'accompagner, à se régler sur lui qui nous mène fidèlement vers la Saint Jean et nous ouvre enfin l'été...Et notre propre pleinitude.
Mais pas cette année !
Il pleut tout le temps et il fait froid ! Il y a de l'abus ! L'archétype du printemps, venu nous titiller dès Pâques, comme d'habitude, ne tient pas ses promesses, voilà tout! Et nous pouvons mesurer à notre déprime à quel point il est agissant ! Ainsi font les archétypes qui viennent irrésistiblement nous animer de l'intérieur, sans qu'on s'en doute souvent. Le beau renouveau annuel, redémarrage attendu du cycle, voilà qu'il est remplacé par l'archétype de la Panne (oui, c'est un archétype!)! Il ne manquait plus que ça ! Si on ne peut même plus compter sur les éléments et les saisons pour être le miroir de notre âme et nous bercer sur leur rythmes toujours recommencés, pour ordonner correctement notre vision du monde ! Nous voilà aussi en panne !
Point de soleil: point de tension des opposés.
Point d'opposés: point de dynamique. Et sans dynamique, pas de ressort, pas d'envie, pas de force. Plus de vent dans nos voiles, plus de désir dans nos veines pour irriguer la moindre entreprise et lui donner le lustre du neuf. On attend ! Mes sandales neuves se rongent dans le placard à côté des robes légères, tandis que j'ai resorti mon manteau en cachemire ! Une attente découragée comme devant un feu d'artifice qui a pris l'eau et ne produit que des gerbes avortées et des pssshuuut de pétards mouillés! Un désastre ! Pire: une déception d'enfant dont le jouet d'anniversaire sort cassé de sa boite ! Voilà notre printemps !
Sauf que pendant que nous nous nous lamentons, le neuf est occupé à se préparer quand même ! Rien ne résiste au renouveau !